Dans un rapport publié fin septembre, les magistrats de la Cour des Comptes ont analysé l’efficacité de la politique de l’État en faveur du commerce de proximité. Un rapport très complet qui montre le succès de certains dispositifs comme le manager de centre-ville et au contraire l’échec retentissant des marketplaces locales pourtant largement financées par l’État.
Avec ses 124 pages d’analyses sur les coûts et l’efficacité des politiques menées par l’État depuis cinq ans pour soutenir le commerce de proximité, le rapport de la Cour des Comptes – présidée par Pierre Moscovici – va faire parler dans le secteur !
Tout au long de ce rapport fourni, issu d’études et d’enquêtes très détaillées, les magistrats de la rue Cambon pointent un manque de coordination des différentes aides voire des résultats décevants pour certains dispositifs. Si « le rôle des managers de commerce a été très apprécié des collectivités locales », certaines études d’ingénierie « ont été d’une qualité inégale, et certaines, financées à 100 % par les pouvoirs publics, peu utiles. » Surtout, le rapport insiste particulièrement sur les enjeux du e-commerce qui ont été « insuffisamment ou mal pris en compte », notamment via le soutien massif aux plateformes locales de vente en ligne (marketplaces locales).
Le soutien aux plateformes locales de ventes en ligne : un échec qui a coûté très cher
Pour la Cour des Comptes, « le soutien aux plateformes locales de marché s’est avéré un échec, ne correspondant aux attentes ni des consommateurs ni des commerçants. » Les magistrats de la rue Cambon en font une conclusion claire : « Les pouvoirs publics devraient en tirer les enseignements en cessant de financer des places locales de marché, et en concentrant leurs efforts sur l’amélioration de l’accompagnement des commerçants. »
Pourtant, selon la Cour des Comptes, pendant des années, les marketplaces locales ont reçu 80% des subventions de la Banque des Territoires – soit 4,2 millions des 5,3 millions d’euros – prévues pour toutes les solutions numériques destinées à aider les commerçants (e-commerce, mais aussi fidélité, visibilité en ligne, bons d’achat…). Et l’on ne parle ici que des aides de la Banque des Territoires. Une seule marketplace locale a par exemple réussi à toucher des aides de la part de plusieurs villes, du conseil régional et du conseil départemental pour un total de 635 000 euros !
Selon la Banque des Territoires, « ces solutions, mises en place rapidement, n’ont pas eu l’impact attendu, tant au niveau de l’adhésion des commerçants que de la fréquentation du public et des ventes générées. »
La Cour des Comptes va plus loin en donnant des détails sur l’adoption de ces marketplaces par les commerçants et les habitants. Dans 9 villes « Action cœur de ville » sur 10, le taux d’adhésion des commerçants à la plateforme de vente en ligne a été inférieur à 50%, et dans plus de la moitié des communes, il n’a pas dépassé 25%.
Au final, plus de la moitié (54%) des collectivités considère que la mise en place de la plateforme n’a pas eu d’impact sur la fréquentation du centre-ville. « Plusieurs acteurs rencontrés par la Cour ont manifesté leur volonté de mettre fin au dispositif », écrit également la Cour des Comptes dans son rapport.
« La vente en ligne ne répond pas à la demande de la clientèle »
Sur les raisons de cet échec, la Cour des Comptes explique que « les commerçants indépendants ne sont souvent pas en capacité de mener de front une activité de commerce physique et une activité de commerce en ligne, compte tenu des contraintes de ce dernier en termes de stock, de gestion des commandes et de logistique. » Et surtout, que « la vente en ligne ne répond pas nécessairement à la demande de la clientèle, qui recherche dans le commerce physique la proximité avec le commerçant, le conseil ou l’expérience client. »
En conclusion de son enquête, la Cour des Comptes résume que « l’enjeu pour le commerce de proximité indépendant semble moins résider dans le développement des ventes par internet que dans le renforcement de ses relations avec la clientèle et de sa visibilité en ligne. »
C’est aussi notre avis et notre mission depuis la création de Petitscommerces en 2017 ! Heureusement, en 2023, la grande majorité des communes ont compris qu’il ne s’agit plus de tout miser sur la vente en ligne mais de mettre en place des dispositifs pour au contraire faire revenir les clients en magasin dans les centres-villes ou centres-bourgs.
Source : Rapport sur la politique de l’État en faveur du commerce de proximité
Copyright photo : ©STEPHANE DE SAKUTIN / AFP
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