Face aux grandes surfaces périphériques, nos centres-villes se meurent. Le citoyen-consommateur, avec l’appui du politique, peut agir pour les sauver.
La fermeture progressive des commerces des centres a rendu la dévitalisation visible par tous. Mais elle cache une réalité bien plus profonde marquée par la dégradation de l’habitat, la fuite des équipements et des services du quotidien ou encore la diminution de la population et sa paupérisation.
Lieu de vie
Les rapports se sont accumulés qui démontrent de manière irréfutable que les coeurs de villes sont désormais fatigués et parfois s’arrêtent de battre. Le constat est partagé par tous. Mais il reste à mettre en oeuvre des solutions. Il y en a. Plusieurs pays voisins, comme l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas ou le Royaume Uni ont mieux protégé leurs centres que nous. En France même, certaines collectivités parviennent à lutter contre ce que certains présentent comme un déclin inexorable.
Mais les forces en jeu sont considérables. Du côté de la préservation des centres, la prise de conscience désormais établie qu’il ne s’agit pas que d’une affaire de commerce, d’entreprises ou de concurrence, mais bien d’un enjeu de société.
Et cet enjeu n’est rien moins que notre conception de la ville et du lien social. Veut-on la pérennité de la ville à l’européenne, avec un centre, lieu de vie sociale, citoyenne, culturelle, religieuse… Bref, un lieu de vie collective et d’identité ? Ou veut-on des cités-dortoirs reliées à des périphéries commerciales par des infrastructures certes performantes mais déshumanisées ?
Trop de surfaces commerciales en périphérie
De l’autre côté, la multiplication inconsidérée des surfaces commerciales en périphérie : entre 1994 et 2009, ces surfaces ont crû, avec la progression de la grande distribution, de 60 %. Dans le même temps, la consommation finale des ménages augmentait en volume de 38 % seulement !
Quel élu local n’a pas subi la « concurrence » que font jouer les grands groupes entre les collectivités ? Et qui se traduit parfois par une « menace » plus ou moins voilée d’implantation dans une commune voisine, avec les emplois et les ressources fiscales afférentes, si une construction de grande surface est refusée.
Vers un moratoire ?
Mais les grandes surfaces ne sont pas les seules responsables. Elles ont beau jeu d’affirmer qu’elles ne font que suivre le consommateur. Il est bien l’une des forces qui jouent actuellement contre les centres ! Il doit en prendre conscience et rééquilibrer ses modes d’achat, à charge pour les pouvoirs publics de lui faciliter la tâche et de l’encourager.
C’est d’autant plus important que ledit consommateur est aujourd’hui le support d’une nouvelle force qui peut mettre en danger les centres ou leur donner un coup de fouet, si le virage est bien pris par le commerce de détail, par exemple en rénovant l’expérience d’achat : le e-commerce.
Ces forces sont telles que des mesures légères ne suffiront pas pour enrayer le déclin des centres. Il faudra des actions fortes qui déplairont à certains. Pour le Sénat et notre groupe de travail, représentatif de tous les groupes politiques et de toutes les commissions permanentes concernées, tout est sur la table, y compris un moratoire sur les implantations de grandes surfaces, la simplification des règles d’urbanisme, ou encore la refonte de la fiscalité applicable aux différents types de commerces. Nous attendons que le sujet soit mis à l’ordre du jour de la conférence nationale des territoires.
Martial Bourquin (PS) et Rémy Pointereau (LR) sont les rapporteurs du groupe de travail du Sénat sur la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs.
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Source : Les Echos / Le Cercle
Auteur : Martial Bourquin
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